BULLETIN N°7

 

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Avant Propos - Serge Jacquemond
Nous dialoguons avec…
Mme RABETAJSKA   
Réflexion sur le temps passé et présent
- Un nouveau gouvernement pour la Mauritanie - François Beslay
Océan indien : Madagascar, Mayotte -  Rémy Monchany
Du rififi à Wallis -  Serge Jacquemond
A Beyrouth après Hariri  -  J.D.J.


Rencontres
A Sète : Le XVIe Congrès « Les peuples de langue française »   -   Paul Blanc
A Londres : Rencontre avec les administrateurs du Commonwelth - A.Deschamps
The British Empire Museum
A Paris : Hommage à Pierre Savorgnan de Brazza  -  Raymond Césaire


Anecdotes
Portrait type d’un administrateur FOM  -  A.Deschamps


Vu, lu, entendu
Entendu  à la radio : Tempête sur un confetti
Vu à la télévision : Escale au bénin  -   J.Serjac
Vu au cinéma   -  G.Sanner : du Cameroun au Cambodge
Lu dans la presse  -  J.Serjac: Les générosités des pays riches, Pages d’histoire occultés,  Vigilance aux Tuamotou,  La colonisation en Procès    
Lu chez le libraire : Les Comores d’Abdallah par  L.Rencurel,   Négrophobie par  J.Bourdillon,   Les traites négrières -  J.Bourdillon
La vie d’AROM
Activités de l’association : Lettres à Arom, Les gens d’Arom, Le site Internet  -   F.Laurent Atthalin
Manifestation des amis d’Arom : Les anciens du lycée A. Sarraut  -  J.Réau




Avant-Propos

On parle beaucoup actuellement de la colonisation et de ses corollaires : esclavage, exploitation, discrimination... Au pays des faux-semblants, l'amalgame est roi !

AROM est, bien sûr, attentif à ce qui se dit, se proclame, s'édite sur ce vaste sujet touchant l'outre-mer français. On retiendra tout particulièrement la phrase caractéristique d'un journaliste important : « la colonisation, c'est conquérir, massacrer, occuper, soumettre, dominer, humilier, discriminer etc... » (le Monde 2 du 23 avril 2005). La rubrique « Lu, vu, entendu » de ce bulletin a retenu quelques propos ayant une valeur presque symbolique : « la loi scélérate » de février 2005 sur l'enseignement de l'Histoire de la Colonisation sans oublier ses côtés « positifs » ; l'idée blasphématoire d'envisager, d'assouplir la loi du sol dans les territoires d'outre-mer... Heureusement, il faut « raison garder » et certains historiens s'y emploient, comme l'auteur des « traites négrières » que d'aucuns accusent de « révisionnisme ». Il faut aussi se rappeler que cet anticolonialisme virulent ne date pas d'hier. L'horrible caricature reproduite dans la rubrique "Lu dans la presse" ci-dessous  date de 1904. Un siècle !

1905, c'est aussi la mort de Savorgnan de Brazza : à Paris, l'Académie des Sciences d'outre­mer lui rend hommage ; à Brazzville, les présidents du Congo et du Gabon, à côté de Jacques Chirac, posent la première pierre d'un mémorial devant abriter les cendres du grand explorateur humaniste. Certains, entre Ogoué et Congo, estimeraient-ils en 2005 que la colonisation ait pu avoir des effets « positifs »

Ce numéro rend aussi témoignage sur des pays où la France garde encore quelque influence au-delà des mers : révolution de palais pacifique en Mauritanie ; au Bénin, dynamisme des citoyens mélangeant culte du vaudou et pratiques modernes ; réconciliation renouvelée à Madagascar ; espoirs de reconstruction à Beyrouth et, même, aux antipodes, à Wallis, la médiation qui remplace la canonnière de 1904.

A Sète , les peuples - et non les états - de langue française se rencontrent, et aussi à Paris, les anciens élèves du lycée d'Hanoï ; à Londres, on retrouve les « collègues » du Commonwealth avec un coup d'oeil vers le « British Empire Muséum » de Bristol qui privilégie la fierté de la nation et non pas sa repentance..

Serge Jacquemond

Portraits d’hier et d’aujourd’hui

Madame Rabetafika Ranjeva

Madame Rabetafika Ranjeva, Ambassadeur, est délégué permanent de Madagascar auprès de l'UNESCO.

AROM : Madame, vous appartenez, de part votre formation et votre parcours professionnel à une double culture. Vous représentez Madagascar à l'UNESCO depuis maintenant 3 ans et nous savons que cette Institution spécialisée, qui fête son 60ème anniversaire, a toujours été particulièrement active dans la "grande île". Quels sont ses principaux domaines d'intervention ?

Ayant fait toutes mes études, à l'exception de l'année de l'agrégation à Paris, et toute ma carrière dans l'enseignement à Madagascar, j'y ai donc passé la plus grande partie de ma vie, dans un milieu respectueux de notre langue nationale et de nos traditions. J'ai reçu une formation d'angliciste, j'ai le privilège d'être membre du Haut Conseil de la Francophonie : pour confirmer votre remarque, j'avoue que j'apprécie ma chance d'avoir été en contact avec des cultures différentes.

A plus forte raison maintenant que je représente mon pays à l'UNESCO, et ce, depuis plus de 3 ans. Je suis heureuse d'être là pour fêter son 60ème anniversaire ; en effet, malgré l'insuffisance des ressources financières de l'Organisation, qui nuit parfois à sa visibilité, elle accomplit une oeuvre immense dans les Etats membres comme le nôtre. Sa volonté de s'intéresser à tous les êtres humains et à toute la planète peut provoquer des critiques au sujet de ses trop grandes ambitions. A Madagascar, elle intervient dans de multiples domaines , mais plus particulièrement dans ceux de l'éducation et de la sauvegarde du patrimoine naturel et culturel matériel et immatériel. C'est un programme très vaste déjà, puisque l'Education pour Tous l'amène à considérer l'éducation formelle et non formelle, notamment dans l'alphabétisation où elle a fort à faire étant donné la superficie de notre Grande Ile.

AROM : Il y a toujours eu du côté français, et au-delà de la période coloniale, un grand intérêt scientifique pour Madagascar. Comment celui-ci se maintient-il et se combine- t-il avec les programmes de l'UNESCO ?

L'intérêt scientifique de la France lui a fait créer l'Académie malgache peu après le début de la colonisation. Elle a été une auxiliaire de la domination coloniale, certes, mais elle a offert un cadre pour le développement des connaissances sur la terre et le peuple : les Malgaches se sont bien approprié cette Académie par la suite.

Pour avoir des précisions sur les différents champs d'intérêt dans les sciences, c'est aux Français eux-mêmes qu'il faut s'adresser. Je ne peux parler que de ce que je vois : la biodiversité est un domaine de prédilection; et on a apprécié la grande conférence organisée à l'UNESCO par le Ministère de la Recherche scientifique français en début d'année, à laquelle le Président de la République de Madagascar était invité :

Il y a aussi la Chaire UNESCO spécialisée dans les Droits de l'homme à l'Université de Fianarantsoa qui reprend vie après quelques années difficiles.

AROM : N'y a-t-il pas un risque pour Madagascar, au fur et à mesure que se développe le tourisme, de voir son patrimoine et l'équilibre de ses écosystèmes, que nous savons fragiles, mis en danger ?

Oui, le tourisme incontrôlé est une menace pour le pays ; sans parler de la population. La législation et la réglementation en la matière ont besoin d'être développées. Pour ne pas rompre l'équilibre des écosystèmes, les projets pour la promotion du tourisme doivent être accompagnés d'études d'impact environ nemental.
Le patrimoine culturel aussi peut subir des préjudices, par exemple si un hôtel se construit à un endroit interdit selon les règles de gestion d'un site inscrit sur la liste du patrimoine mondial.

AROM : Nous savons que le grand débat de cette 33ème Conférence générale sera la Convention sur la diversité culturelle. Quels sont les enjeux de cette négociation pour Madagascar qui est lui aussi un vieux pays à la charnière de plusieurs mondes ?

La 33ème Conférence Générale de l'UNESCO était particulièrement importante car, entre autres points, trois instruments devaient y être proposés à l'adoption. Précisons que ce stade est atteint après une longue procédure, et que les discussions finales ne doivent plus présenter de difficultés. Ainsi, la Déclaration sur la bioéthique, et la Convention sur la lutte anti-dopage dans le sport ont été rapidement adoptées.

En revanche, la question de la diversité culturelle et l'élaboration puis l'adoption du texte de la " Convention sur la protection et la promotion de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques " ont provoqué une grande effervescence. Le libellé même du titre révèle les enjeux de la négociation. Pour un pays comme Madagascar, cela impliquera une coopération renforcée entre le Nord et le Sud, un traitement préférentiel pour les pays en voie de développement, le renforcement de l'aide aux industries culturelles et aux productions artistiques grâce à la co-production et la co-distribution. Il faut espérer aussi que l'assistance du Fonds pour la diversité culturelle se réalisera.

 

AROM : Vous savez que AROM s'efforce de concilier tradition, culture ancestrale et modernité. Madagascar est le pays dans lequel le plus grand nombre de ses adhérents a travaillé et certains y ont d'ailleurs fait souche. Nous sommes aussi voisins dans l'océan indien. Que dire à tous ceux qui gardent de Madagascar une vision davantage du passé que tournée vers l'avenir ?

Il est évident que la nostalgie n'est pas propice à la marche en avant vers un avenir meilleur. Beaucoup de Malgaches d'ailleurs se tournent vers un passé encore plus ancien que celui auquel pensent les Français dont vous parlez. C'est un lieu commun de dire que cette attitude n'est pas constructive.

On ne peut s'empêcher de voir les difficultés du présent, mais certains savent saisir les opportunités. Peut-on faire appel et croire à la solidarité entre ceux qui vivent et travaillent dans le confort et ceux qui font partie de la population vulnérable dans ce pays qui leur est cher? .

 

Réflexions sur le temps passé et présent.

Un nouveau gouvernement pour la Mauritanie par François Beslay

François BESLAY (cf. Bulletin 1), ancien chef d’état major de l’armée Mauritanienne lors de l’indépendance en 1960, continue de suivre de près l’évolution du pays en tant que secrétaire général de l’association des « Amies de la Mauritanie ».

Le 3 Août dernier, un coup d'Etat militaire, le troisième depuis l'indépendance, mettait fin à ce qu'il faut bien appeler le régime dictatorial du Président Maaouiya ould Taya qui durait depuis 21 ans. On ne peut que souligner les aspects positifs de ce changement opéré par les proches du président en activité :

  1. Le coup de force s'est imposé en douceur, sans un coup de fusil ni même une arrestation et a été fort bien accueilli, avec soulagement, par la population.

  2. Les déclarations de l'auteur du coup d'Etat, le Colonel Ely ould Mohamed Vall, précisant que son but était de mettre fin à un régime présidentiel et de rétablir la démocratie ont  finalement rassuré les organismes comme l'OUA et l'UMA ainsi que la France et les USA qui ont accepté ce changement.

  3. La grande francophilie du Président du CMJD ( Conseil Militaire pour la Justice et la Démocratie) le Colonel Ely ould Mohamed Vall et de son Premier ministre Sidi Mohamed ould Boubacar qui jusque-là était Ambassadeur de la RIM à Paris.

  4.  L'engagement de soumettre à référendum la décision de limiter la Présidence à deux mandats de 5 ans et de procéder avant deux ans à des élections générales. D'exclure de la candidature à ces élections les militaires membres du CMJD ainsi que les Ministres du Gouvernement.

- Le Président a refusé la reconnaissance du PCD (Partie de la convergence démocratique) a cause de son orientation islamiste. (a rajouter ici ?)

Ce changement de régime a fait l'objet de plusieurs articles de presse, notamment dans « Jeune Afrique » et « L'intelligent. »

François Soudan résume notamment les motivations des militaires du putsch :"…: Ce sont des gens du sérail, parfois associés aux errements du régime déchu mais suffisamment à l'écoute des pulsions du pays pour s'apercevoir de son obsolescence, qui ont mis un terme à sa course folle."

A signaler également l'article de Mr.Albert Tévoédjérè, ancien Secrétaire général adjoint des Nations Unies, qui reprend brièvement l'histoire de la Mauritanie depuis l'indépendance en rappelant et louant toute l'œuvre accomplie par le regretté Président Moktar ould Daddah.

Pratiquement, le Chef de l'Etat a libéré tous les prisonniers politiques et permis le rapatriement qui est en cours de tous les  exilés.

En conseil des Ministres il a insisté sur la nécessité "d'une gestion efficiente des deniers publics"  et donné des instructions fermes " quant à la nécessité de promouvoir les fonctions de contrôle administratif et financier au niveau de toutes  les structures gouvernementales." Sans plus attendre, il a relancé la prospection minière en signant un accord avec la société Wad Rawa industrial investements pour la recherche d'uranium au Tiris Zemmour.

Tout ceci permet d'espérer qu'un pas réel sera fait en faveur de la démocratie et assurera une juste répartition des profits apportés par la très prochaine mise en exploitation du pétrole off-shore. C'est le vœu que nous formulons avec tous les Mauritaniens.


La France dans l’Océan indien.Par Marcellin Leroy

Correspondant d’AROM pour la zone, M .Leroy puise ses informations aux meilleures sources.

En juillet dernier, le sommet des chefs d’Etat de la Commission de l’Océan indien (COI), et la visite officielle que le Président de la République a effectuée à Madagascar à cette occasion, sont venus rappeler la spécificité de la présence française dans l’Océan indien et des relations étroites qu’elle entretient avec les autres Etats riverains.
Le débat lancé en septembre par le Ministre de l’Outre Mer sur les conséquences de l’immigration comoriennes à Mayotte et les moyens de la contenir illustre un autre aspect de la présence de la France dans l’Océan indien et des relations de voisinage qui en découlent.

La « France de l’Océan indien » comporte trois entités distinctes : La Réunion, Mayotte et les Terres australes et antarctiques françaises (TAAF) dont relèvent depuis 2005 tant les îles Eparses du canal du Mozambique (îles Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India et Europa) que l’île Tromelin. (Cette dernière est revendiquée par l’Ile Maurice, les autres par Madagascar) A travers ces trois entités la France appartient à la zone géographique couverte par l’Union Africaine.
Plus qu’un simple partenaire de l’Afrique, elle en est un voisin immédiat, voire une puissance régionale. Cette spécificité ne semble pas encore totalement acceptée.

Pour chacun des Etats de la zone (Comores, Madagascar, Maurice et Seychelles), la France demeure le premier partenaire économique, le premier investisseur et le premier bailleur de fonds bilatéral. Ces facteurs communs ne doivent pas cependant faire ignorer la spécificité de chaque relation bilatérale.

 La Réunion

La Réunion joue un rôle croissant dans ces relations bilatérales. Le président Ravalomanana a effectué deux visites officielles à la Réunion centrées sur les échanges commerciaux et les investissements. De son coté la Réunion, et plus particulièrement son Conseil Régional, a engagé ses propres actions de coopération notamment dans le domaine de l’éducation (« Programme d’Appui Réunionnais au Système Educatif Malgache »).

Mayotte

En dépit de la volonté manifeste, et clairement exprimée à plusieurs reprises, de la population de Mayotte de demeurer française, les Comores continuent de réclamer le rattachement de l’île. Elles invoquent la position adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies qui a admis en son sein les Comores en 1975 en affirmant qu’elles comportent quatre îles, dont Mayotte.
Cette contestation a peu de conséquences pratiques au niveau international, dans la mesure où l’immense majorité des Mahorais souhaite demeurer française, ce qui ne permet pas de considérer ce contentieux comme un processus de décolonisation inachevé sur lequel devrait se prononcer les Nations Unies ou des organisations internationales comme l’Union Africaine. L’issue d’un éventuel nouveau référendum d’autodétermination que pourraient réclamer ces organisations ne fait aucun doute.

Dans la pratique, les responsables comoriens sont conscients de la faible attractivité que représente l’Union des Comores pour les Mahorais et ne conçoivent pas sérieusement qu’un rattachement soit envisageable à court ou moyen terme. Pour des raisons de politique intérieure, tout homme politique comorien se doit cependant de réclamer rituellement ce rattachement.
Cette position officielle permet aux Comores - et il s’agit là sans doute de la seule conséquence pratique significative de cette situation – de ne pas coopérer activement à la lutte contre l’immigration clandestine vers Mayotte. L’ampleur prise par ce phénomène menace désormais directement l’équilibre social de Mayotte et handicape son développement. Selon l’INSEE, l’île abritait en 2002, 55.000 étrangers (à 96% Comoriens et à 80% en situation irrégulière) pour 160.000 habitants. La France a procédé en 2004 à 8.500 reconduites à la frontière depuis Mayotte vers les Comores. Tant les structures sanitaires que le système éducatif sont soumis à une très forte pression et doivent produire un effort considérable pour assurer un service de qualité.
A l’inverse, l’émigration et la diaspora comoriennes en France, constituent la principale ressource économique des Comores par l’importance des transferts opérés. Selon la Banque Mondiale, ceux-ci représentent entre 35 et 40 M€ par an, à comparer au 50 M€ du budget national comorien.

Madagascar

- Nos relations avec Madagascar évoluent du fait de la forte volonté d’ouverture sur le monde qui anime le président Ravalomanana qui souhaite parvenir, selon sa propre formule, au « développement rapide et durable » de la Grande Ile. Cette volonté de sortir d’un tête-à-tête avec la France se manifeste tant dans le domaine commercial, avec la montée en puissance des échanges avec les pays asiatiques et l’Afrique du Sud, que dans le domaine des investissements avec la perspective de développement du secteur minier et celui de l’aide publique au développement avec un fort engagement de la Banque Mondiale, de l’Union européenne mais aussi de partenaires bilatéraux comme les Etats-Unis ou la Norvège.
La visite officielle du Président de la République à Madagascar en juillet 2005 a marqué une relance des relations bilatérales qui avaient pâti de la crise de 2002, et a consacré la volonté commune de bâtir un partenariat renouvelé entre les deux pays. Le Président de la République a salué la détermination de son homologue malgache à attirer le maximum d’investisseurs étrangers et ouvrir la Grande Ile sur le monde. Il a invité les entreprises françaises à ne pas redouter cette concurrence mais à relever les défis qui l’accompagnent.
Dans le domaine de l’aide publique au développement, la France inscrit désormais son importante contribution (66 M€ par an) dans une logique de complémentarité avec l’action des autres partenaires de Madagascar. Elle doit démontrer que sa coopération est traditionnelle mais aussi réactive et capable d’évolutions.

Maurice

- La coopération pour le développement occupe une place beaucoup moins importante dans les relations bilatérales entre la France et Maurice en raison des succès économiques mauriciens. Avec 1,2 millions d’habitants, Maurice dispose d’un PIB supérieur de 50% à celui de Madagascar (18 millions d’habitants), elle est le troisième partenaire commercial de la France en Afrique (hors pétrole). Maurice est sortie en 2002 de la « zone de solidarité prioritaire » de la France qui concentre désormais sa coopération dans les domaines de la culture et de l’enseignement supérieur comme elle le fait avec d’autres pays émergeants.
La nécessaire reconversion de l’économie mauricienne qui est directement affectée par la réforme de l’organisation commune de marché du sucre de l’Union Européenne, et la fin des accords multifibres plaident cependant pour une reprise des concours financiers français à l’image de ce que la France a entrepris en faveur d’autres pays émergeants.

Les Seychelles

- Le « miracle seychellois » qui a vu le PIB par habitant multiplié par 8 en 20 ans s’est également traduit par la sortie des Seychelles de la « zone de solidarité prioritaire » et à la réorientation de la coopération française vers la culture et l’enseignement supérieur. Le modèle seychellois d’économie administrée (taux de change fixe, monopole du « Seychelles marketing board »…) donne cependant des signes de faiblesses depuis quelques années : le développement du tourisme stagne et le pays se trouve dans une situation de surendettement préoccupante. La pénurie de devises est devenue le principal obstacle auquel sont confrontés les investisseurs français. La France, qui est le principal partenaire de l’archipel et son « portail » vers le reste du monde en abritant sa seule ambassade bilatérale, devra l’aider à entreprendre la délicate ouverture de son économie.
La coopération régionale avec la Réunion se développe grâce notamment à la conclusion d’un accord cadre de coopération en 2003 comme l’y autorise la loi d’orientation pour l’outre mer.

La république des Comores

- La relation bilatérale avec les Comores est entrée dans une phase de relance avec la visite officielle du président Azali en France en janvier 2005 (la seconde d’un chef d’Etat comorien depuis l’indépendance) et l’organisation d’une commission mixte en avril 2005.
Cet exercice a vu pour la première fois depuis l’indépendance une délégation officielle du gouvernement comorien négocier avec une délégation d’élus mahorais. Cette commission mixte a en effet été l’occasion de discuter non seulement de coopération mais aussi de la question de la circulation des personnes et des biens entre les Comores et Mayotte.
Dans le domaine de la coopération, la France accorde la priorité à l’appui aux nouvelles institutions de l’Union des Comores afin de consolider le processus de réconciliation. La France a apporté une contribution importante à la résolution de la crise ouverte par le sécessionnisme anjouanais en 1997 et le coup d’Etat de 1999, en concertation avec l’Organisation de l’Unité Africaine puis l’Union Africaine et l’Afrique du Sud ainsi que l’Organisation Internationale de la Francophonie. Le système institutionnel de la nouvelle Union des Comores est complexe et sa mise en place continue de nécessiter un appui extérieur. Les autres priorités de la coopération bilatérale - dont le volume vient de dépasser celui qu’il connaissait avant la crise de 1997- sont le développement rural et la santé.
En ce qui concerne les relations avec Mayotte, il a été convenu de canaliser la circulation des personnes par la mise en place d’une liaison maritime régulière, la délivrance de visas à Anjouan et Mohéli et l’assouplissement de la délivrance de visas pour certaines catégories de personnes, particulièrement les travailleurs saisonniers munis d’un contrat de travail.
Dans le domaine des biens, il a été décidé de faciliter les exportations de produits viviers d’Anjouan vers Mayotte et de mettre ainsi un terme à l’anomalie consistant à voir Mayotte importer d’Europe l’essentiel des produits alimentaires alors qu’Anjouan était dans l’impossibilité d’écouler ses surplus dans l’île voisine.
Cette commission mixte a également été l’occasion d’un accord de principe sur la délicate question de la participation des équipes mahoraises aux compétitions sportives régionales dont elles sont exclues à la demande des Comores. Le document final de cette commission mixte précise en effet que les parties « ont convenu de renforcer les échanges sportifs par la participation d’équipes mahoraises à des compétitions associant les clubs et fédérations de l’Archipel, ainsi qu’aux compétitions régionales dans l’Océan indien ».
Les Comores offrent elles aussi l’exemple du développement d’une coopération conduite par le Conseil Régional de la Réunion avec son « Projet d’Appui de la Réunion à l’Agriculture Comorienne » – PARDAC).

La commission de l’Océan Indien (COI)

Les relations de la France avec ses voisins de l’Océan indien ne se résument pas à la somme des coopérations bilatérales conduites par l’Etat ou par les collectivités réunionnaises. Elles se traduisent également par l’affirmation d’une communauté de destin que porte la Commission de l’Océan indien (COI), seule organisation régionale africaine dont elle soit membre de plein exercice.

La COI a été créée en 1984 par Madagascar, Maurice et les Seychelles. La France y a adhéré en 1986, en même temps que les Comores, « pour permettre à la Réunion de participer à la coopération régionale ». Cette adhésion a permis de renforcer la légitimité de la présence française dans l’Océan indien et d’offrir à la Réunion un cadre approprié pour la défense des intérêts communs aux Etats du Sud Ouest de l’Océan indien (protection de l’environnement, gestion durable des ressources halieutiques, lutte contre le Sida…). Le succès de cette coopération, dans laquelle les collectivités territoriales jouent un rôle actif, conforte la Réunion dans son statut de partenaire régional.
Mayotte n’en est pas membre et il est peu probable que les Comores y consentent à court terme mais l’île a naturellement vocation à participer à terme à la COI.

Le sommet des chefs d’Etat de la COI en juillet 2005 a été l’occasion de faire un bilan des activités de l’organisation. La COI a longtemps souffert de faiblesses structurelles (faibles effectifs du Secrétariat Général) et de la définition d’objectifs irréalistes. Fondée pour développer l’intégration économique régionale, la COI a été peu à peu marginalisée avec l’apparition du COMESA (Marché Commun d’Afrique Australe et Orientale) et de la SADC (Communauté pour le Développement de l’Afrique Australe). D’autre part, le statut de la Réunion qui est une « Région Ultra-Périphérique » de l’Union Européenne l’a privée de toute capacité de conclure des accords commerciaux avec ses voisins immédiats qui appartiennent tous au groupe des « ACP » (Afrique-Caraïbe-Pacifique). Les relations commerciales entre l’UE et les ACP sont régies par l’accord de Cotonou. L’intégration commerciale régionale se développe donc sans la Réunion, ni la COI.

Depuis sa création, la COI a drainé prés de 150 M€, dont plus de 100 M€ du Fonds Européen de Développement qui, sans elle, n’auraient pas été dépensés dans la zone. L’enveloppe des projets en cours s’élève à 86 M€, une somme considérable comparée à la taille réduite du Secrétariat général de la COI (une Secrétaire Générale et quatre chargés de mission). Les projets les plus importants portent actuellement sur l’identification de la ressource halieutique commune car migratoire (programme de marquage des thons – 14 M€) et sa surveillance.

Le sommet de juillet 2005 a entériné l’adoption des nouvelles orientations stratégiques de l’organisation en la positionnant sur des domaines dans lesquels elle a démontré son utilité et sa compétence : protection de l’environnement et le développement durable (particulièrement la pêche), le renforcement des solidarités et l’affirmation de l’identité culturelle de l’Océan indien.

Cette dimension multilatérale de la présence française dans l’Océan indien renforce la synergie entre les efforts d’intégration régionale des collectivités d’Outre mer et la politique étrangère du gouvernement français. Elle doit permettre de dépasser des contentieux anachroniques, de valoriser les atouts dont disposent Mayotte et la Réunion, et de renforcer le statut de la France comme partenaire privilégié de l’Afrique.

 

Du Rififi à WALLIS (sans Futuna !)

En ce 22 septembre 2005 on aurait pu se croire à Bastia, alors qu’on était…..à quelques 20 000kms de là, en plein pacifique, à UVEA, l’île principale (77 km2) des Territoires Français d’Outre-Mer de Wallis et Futuna (à 2 degrés seulement de la ligne internationale de partage des dates.

Donc, ce jour-là, alors que l’aube n’avait pas encore éclairé les ministères parisiens, des milliers d’électeurs wallisiens manifestaient, armés, qui d’un fusil français, qui d’une machette polynésienne, en dressant des barrages sur la piste de l’aérodrome pour s’opposer au projet de l’Administrateur Supérieur, le préfet Xavier de Furst, de faire atterrir sur l’île des renforts de gendarmerie ! Mais, ne disposant pas, comme ses collègues de la métropole, d’escadrons héliportés du GIGN, le préfet s’est trouvé fort dépourvu…et la poursuite de sa carrière fort compromise.

Qu’on en juge :

Wallis et sa voisine FUTUNA, à 250 Kms plus au Nord-Est, jouissent depuis le protectorat de 1887, et encore plus depuis le statut de « TOM » de 1961, d’un privilège certainement envié par d’autres citoyens d’une île française de la méditerranée. Leurs populations sont en effets gouvernées, d’une manière très autonome par leurs chefs coutumiers, leurs « rois » locaux les LAVELUA.

Ainsi, à Wallis, règne depuis 45 ans le lavelua TOMASI KALI MOETAKE, entouré du respect et de l’affection de ses sujets. Mais hélas ! L’âge - 87 ans - l’a rendu un peu affaibli ! En fait, c’est sa fille, ETUA, qui tient les rênes du palais royal ! Cette dernière fait l’objet de critiques véhémentes, attisées par quelques scandales de corruption  et de comportements dans la famille royale révélés au grand jour.

Comportements de nature pénale, que l’Administrateur supérieur, crû devoir, dénoncer au sein de l’Assemblée Territoriale (comme l’aurait fait un député au Palais Bourbon) « J’ai dit aux chefs coutumiers qu’ils n’étaient pas au dessus des lois et que le droit devait être appliqué ».

Dès le début  de mai, les passions et les rivalités entre clans prétendants à la « royauté » font rage !....et on arrive au 22 septembre.
Le préfet, qui avait pris parti, s’apprêtait, ce jour-là, à faire introniser un rival du vieux lavuela. Devant la véhémente protestation armée et la détermination sans faille, des fidèles de TOMASI KALI MOETAKE, le gouvernement français, dans sa sagesse, n’a pas envoyé un avis. Mais un médiateur….Ce dernier, le secrétaire Général de la Nouvelle Calédonie toute proche (2 000 Kms), a confirmé – nous apprend le Monde du 29 septembre – la reconnaissance par l’état du LAVELUA actuel. Preuve évidente que ce dernier n’était pas « au dessus des lois ».

                     Serge Jacquemond

Beyrouth, été 2005.

Plus d’applaudissements des passagers lors de l’atterrissage en douceur à la mi-août à  Beyrouth !!  Aéroport  rebaptisé Rafic Hariri du nom du Premier Ministre assassiné, de l’homme d’affaires et entrepreneur en travaux publics ; comble d’ironie post mortelle, qui se retrouve privé d’une piste de dégagement par vents contraires condamnée par la construction  d’une tour d’une vingtaine d’étages de trop. Un des scandales de cet été, car en haut lieu après avoir remercié les investisseurs étrangers, il est envisagé d’imposer une procédure d’approche aux pilotes et non une remise en cause de la construction. Sécurité oblige !!

La mort de Rafic Hariri, malgré sa voiture blindée aux appareils de brouillage les plus sophistiqués, a cimenté un peuple qui a réussi pour quelques semaines à réanimer le centre ville vidé par la reconstruction de luxe.Ils avaient convergé comme autrefois vers la place des Canons, du Nord, du Sud, de la Plaine, de la Montagne , Druzes, Sunnites, Chiites, Maronites, Grecs Orthodoxes ….en une foule grouillante, chaleureuse.

Aujourd’hui, l’immense place autrefois cœur, poumon du pays avec son bazar, ses taxis collectifs, s’est à nouveau vidée avec les illusions. Bien sûr, les chefs des services occultes sont finalement  tombés après avoir eu leurs photos brandies à bout de pique lors de ce 14 mars mémorable et leurs amis retournés chez eux laissant sans doute quelques « concierges »avec encore pour missions des besognes meurtrières…

Dans ce décor d’un théâtre de luxe, où les feux tricolores ne stoppent ni le vent chaud et humide ni les voitures, où le nombre impressionnant de véhicules pollueurs tout terrain semblent des buffles noirs entourés par les deux roues, tels des mouches et par les piétons  suicidaires traversant en courant les voies rapides.Hariri, le Sunnite, aura ici sa sépulture. Déjà il repose aux pieds de la nouvelle mosquée qui écrase de sa nouvelle masse la belle église de pierre classée monument historique.

Quelques ruines à même le sol, les vestiges des travaux de fouille et à deux pas le quartier des affaires, banques, boutiques de grandes marques et restaurants de toutes nationalités … Décor à la Chirico qui surtout le soir, s’anime. Virgin ouvre ses portes à toutes les musiques du monde, son voisin, le  Nahar, journal indépendant, protège sa liberté d’expression en renforçant le nombre de vigiles dans son nouvel immeuble transparent.

Avec l’insécurité, les commerçants disent que leur chiffre d’affaires a chuté de trente pour cent en juillet, la clientèle du golfe celle qui dépense étant moins nombreuse mais août fût meilleur. « Paul » a toujours autant de succès avec ses baguettes !

Dans le quartier d’Achrafieh, dans ses rues étroites et pentues, la vie rappelle le Beyrouth d’avant (on n’emploie plus le mot « évènements » pour désigner la guerre..) La vie nocturne se concentre autour de la rue Monod avec ses boîtes, ses bars à vins où la jeunesse se presse, passe le temps et essaie d’oublier la crise, l’avenir.  Images intolérables pour certains qui veulent toujours déstabiliser ce pays.

Eté nourri d’invitations, retrouvailles des familles éclatées avec dans leurs poches revolver un passeport français, anglais, mexicain…les uns y travaillent, les autres y étudient, générations exilées par la guerre. Mêmes diplômés d’universités prestigieuses, la crise ne leur permet pas de trouver un travail ou un salaire leur permettant de revenir.

Eté, mois des mariages , cette année encore la tendance est aux feux d’artifice tirés à chaque fête ou occasion remplaçant les vieux  pétards et le souvenir des balles traçantes dans le ciel pour fêter la Vierge Marie ou d’autres Saints.

A table, les femmes parlent nourriture, la langue française est un aromate de plus dans la conversation mais on dit encore entre chaque plat « on  a trop mangé… » dans la langue de Rabelais.Les hommes de leur côté « font » de la politique, les noms circulent sur une sinistre liste noire de personnalités à assassiner, y figurer donne un certain poids, surtout lorsque l’on a retourné sa veste.

Du retour du Général Aoun après son exil à Paris, du départ pour cette capitale du chef de milice Samir Geagea, selon le principe des vases communicants.Mais le sujet de l’été c’est la commission Mehlis, désigné du nom de son responsable et par l’Onu pour enquêter sur l’assassinat de Rafic Hariri.

Les plateaux de cigarettes ne circulent plus comme autrefois, les femmes ont tendance à gonfler leurs lèvres, à rendre blond ce qui était brun, les pantalons descendent sous la taille, le haut découvre le nombril en couvrant la tête d’un foulard pour certaines ; On rigole de la dernière visite du Président nageur sur le chantier de la future et seule piscine olympique du pays.

Le champagne coule à flots dans les plages branchées, comme à St Tropez. Les touristes nostalgiques passent à Byblos voir le restaurant de Pépé et son musée où les photos de Brigitte Bardot et du tout Paris de l’époque jaunissent. Dans le bazar restauré de ce charmant port, des jeunes français se sont installés ; qui d’un tourneur sur bois nouvellement venu à côté d’un restaurant où l’on sert du magret de canard et du foie gras fabriqués localement par un jeune couple franco libanais .

Les hommes parlent, les femmes conversent, les jeunes racontent leurs vies ailleurs…..

Ces quelques lignes ne sont pas le reflet du pays et de toute sa population, mais celles d’un visiteur concerné par ce pays qui aimerait retrouver la magnifique baie de jounieh sans la construction d’une île artificielle pour y construire encore des hôtels et habitations de luxe.
Pour les poissons, il y a longtemps qu’on n’en trouve plus beaucoup……..

J.J. El KHOURY – Août 2005- Ancien journaliste à CACTUS, journal satirique libanais (1974) Auteur de l’exposition itinérante en France « Liban Meurtri » 1977

Rencontres

La XVIeme Conférence des Peuples de langue française

Choisir comme thème d’une conférence internationale « Une francophonie fière et forte » quand tant de linguistes et d’hommes de la rue vont se lamentant sur les difficultés croissantes de la langue française à maintenir sa présence dans le monde et à sauvegarder les qualités qui la firent juger apte à l’universalité relève presque de la provocation.
C’est cependant le défi qu’ont lancé les organisateurs de la XVIème Conférence des Peuples de langue française qui s’est tenue à Sète (Hérault) les 6, 7 et 8 juillet derniers dans le fort désarmé qui abrite le « Théâtre de la Mer ».
Après la cérémonie d’ouverture, les porte-parole des Communautés membres ont présenté et commenté les actions que celles-ci ont conduites avec succès depuis la précédente réunion de Bruxelles en 2003 pour faire asseoir leur droit à vivre dans leur langue. Les deux journées suivantes ont été consacrées à des exposés et débats thématiques autour des autres principaux domaines de la culture, de l’économie, de la diplomatie et de la communication.

Dans l’exposé inaugural, M. Stelio Farandjis, ancien Secrétaire Général du Haut Conseil de la langue française, a montré qu’en matière de culture « l’exceptionnel devrait être la règle » et que « l’universalité excluait l’uniformité » ; que par ailleurs la France était fondée à s’attacher à l’exception culturelle parce qu’elle est elle-même exceptionnelle par sa place géographique, politique et spirituelle dans le monde. Il a ensuite examiné les moyens pratiques d’une politique de stimulation de la langue.

Sans doute l’orateur le plus engagé dans le combat quotidien de la Francophonie puisqu’il anime depuis longtemps l’émission « Espace francophone » à FR3, Dominique Gallet a dessiné le cadre dans lequel il voyait la francophonie répondre « au défi de la communication au XXIème siècle ».

A la fois Président d’une banque, la B.R.E., et du Forum Francophone des affaires, M. Stève Gentili était bien placé pour associer la réflexion à l’observation des réalités quotidiennes dans une mise au point sur la langue française dans l’économie…M. Jean-Louis Beffa, Président de la Compagnie de Saint Gobain et aussi membre du Conseil Supérieur de la langue française, avait bien voulu envoyer une intervention, lue en séance, pour faire profiter la Conférence de l’expérience du chef d’une entreprise de taille mondiale qui a maintenu le principe du français langue officielle. Maître Decorps Président des Notaires Francophones a montré l’importance actuelle et à terme de l’enjeu de la terminologie juridique dans la compétition mondiale…
A la lumière de leur expérience à la tête des plus prestigieuses missions diplomatiques françaises, les ambassadeurs Bernard Dorin et Pierre-Louis Blanc ont, chacun à sa manière, montré comment la vision particulière des relations internationales qui inspire la politique de la France s’exprime dans tous les domaines à la faveur des rapports bilatéraux et multilatéraux.

Tous les exposés ont été suivis de débats conduits avec réalisme et lucidité mais sans pessimisme. Le grand écrivain béninois Olympe Quénum Bély a participé à chacun d’eux pour faire profiter les participants de la richesse de son expérience. Le grand discours de M. Robert Collignon, ancien Ministre-Président de Wallonie, sur la situation politique actuelle et les réformes constitutionnelles futures en Wallonie et à Bruxelles a été l’objet d’une ovation debout. Dans sa synthèse, M. Sylvain Simard, ancien Ministre du Québec et Président d’honneur de la Conférence, en a souligné le caractère réaliste et volontariste et s’est félicité de l’atmosphère de solidarité qui y a régné d’un bout à l’autre…Président en exercice, M. Olivier Maingain, Député de Bruxelles, a prononcé le discours de clôture dans un esprit de vigilance, d’opiniâtreté et de confiance. Il a annoncé que la prochaine Conférence se tiendrait au Québec.

Les résolutions relatives à chaque Communauté membre et à la France, adoptées à la fin des travaux, ont comme de coutume été rédigées avec le souci d’être opérationnelles dés le court terme…

En dehors de leurs travaux les participants ont pu visiter, Sète, la ville de Valéry, de Vilar et de Brassens, son réseau dense et complexe de canaux entre la mer et le vaste bassin de Thau au pied d’une montagne « à l’échelle de l’homme » que nommèrent peut-être, jadis, les navigateurs phéniciens.

                      Paul Blanc

A Londres :Rencontre avec les administrateurs du Commonwealth

Al'invitation de l'Institute of Commonwealth Studies de l'Université de Londres une rencontre franco-britannique intitulée Memories of Empire s'est tenue à Londres du 27 au 29 juin dernier.

Y participaient, du côté français, deux membres d'AROM, Jean Clauzel qui a traité du métier d'administrateur en AOF de 1946 à 1960, Alain Deschamps, avec pour sujet les administrateurs et l'évolution de Madagascar, Pierre Boilley, professeur d'histoire africaine en Sorbonne, qui a fait état des recherches et publications consacrées depuis 1960 à la colonisation et Henry Médard, spécialiste de l'Afrique orientale.

Du côté britannique les intervenants furent, eux aussi, soit d'anciens districts commissionners, soit des universitaires spécialistes des questions de colonisation et de décolonisation.

C'est ainsi qu'un ancien D.C. en Rhodésie du Nord traita de la situation des quelques 200 000 anglais établis dans ce riche territoire minier avant l'indépendance et de ceux, encore nombreux, qui s'y sont maintenus quand il devint l'actuelle Zambie. Un autre fit part de son expérience de jeune administrateur dans le nord du Nigeria. Un troisième qui, après l'Ouganda, fut le commissaire résident anglais aux Nouvelles Hébrides (aujourd'hui Vanuatu) décrivit avec un humour tout britannique, la cogestion avec son homologue français de ce "condominium", construction ubuesque, où, en cas de contestations entre les deux puissances coadministrantes, la médiation incombait au roi d'Espagne représenté, après la chute de la monarchie espagnole, par un fauteuil devant lequel les deux résidents s'inclinaient respectueusement pour solliciter son avis.

Des professeurs d'Oxford, université où, faute d'une école coloniale spécialisée, les aspirants D.C. recevaient l'essentiel d'une formation de gentlemen complétée de cours sur leur futur métier, comparèrent nos politiques et méthodes coloniales et post coloniales, notamment à propos de notre Côte d'Ivoire et de son voisin le Ghana où sur des terroirs assez semblables, s'appliquaient des régimes fonciers fort différents. Chacun des exposés fut suivi de débats. Ceux-ci firent apparaître que, si les doctrines et comportements des coloniaux anglo-saxons et latins n'étaient pas les mêmes, ils étaient, lorsque les uns et les autres affrontaient les mêmes réalités sur le terrain, moins éloignés qu'on ne l'imaginait. Que les Anglais se soient faits, avec Lord Lugan, les champions de l'indirect rule ne signifiait pas qu'aux niveaux de base, districts officers et commissionners aient été beaucoup moins proches de leurs administrés que leurs homologues français.

Notre République Française, tout comme la monarchie britannique, a su ménager les grandes chefferies et les mettre au service de sa domination. Elle a aussi, fini par préférer, à une assimilation illusoire, une plus pragmatique, et donc britannique "association".

Les échanges avec nos collègues britanniques montrèrent, en tout cas, que nous partagions la même fierté et la même nostalgie de l'exercice d'un métier disparu et la même incompréhension indignée pour le travestissement en "colonialisme" condamnable d'une colonisation dont nous ne rougissons pas d'avoir été les agents.

Entre anciens "coloniaux" donc, une certaine connivence ? Malgré, hélas, une barrière des langues, génératrice de dommageables pertes de temps et vraisemblablement de quelques incompréhensions. Un obstacle que le patient et méritoire concours de Henry Médard, interprète bénévole, avait bien du mal à franchir.

Michael Twaddle, organisateur de la rencontre, parlait un excellent français. Directeur, dans le cadre de l'Institut of Commonwealth Studies d'un projet de recherches sur l'histoire du service colonial britannique depuis la guerre financé par l'association des retraités des services d'Outre Mer, la disponibilité de tous les instants avec laquelle il s'est attaché à rendre notre séjour confortable, agréable et plein d'intérêt, avec, notamment la visite de la section africaine du British Museum et, à Kew, celle des très modernes archives nationales méritent les plus vifs éloges et remerciements. Nos remerciements lui sont aussi dus pour le document Administering Empire : an annotated checklist of personnal memoirs and related studies dont il a remis à chacun de nous un exemplaire. Comportant les titres de près de 16 500 ouvrages de théoriciens ou praticiens de la colonisation et de la décolonisation, il devait être, au moins pour nos chercheurs, une mine très précieuse de documents. Car nos collègues britanniques ont beaucoup écrit sur leur métier. Nous l'ignorions.

Eux-mêmes étaient persuadés que, comme l'écrira l'un d'entre eux, "à la différence des administrateurs britanniques, les Français ne sont guère enclins à rédiger des mémoires dans le style de "Tam-tam dans les collines de Pongo-Pongo" ou "Vingt ans derrière carabine et moustache".

La copieuse bibliographie annexée au livre "La France d'Outre Mer 1930 - 1960, témoignages d'administrateurs et de magistrats", habilement mis en évidence sur la table de la réunion, devrait les détromper. Et, peut-être conduire, quelques Oxfordiens à se pencher sur nos études et récits. Le dernier numéro de la revue Empire and After, celle des retraités d'Outre Mer, avait déjà assuré, sous la plume de l'excellent M. Twaddle, que notre recueil "constituait certainement une source de première importance pour l'histoire du monde". Pas moins ! Quel enthousiasme au pays de l'understatement !

Voilà bien des raisons pour considérer la rencontre de Londres comme une initiative heureuse et utile. Et toutes les raisons, quelques jours après cette rencontre si cordiale, de partager pleinement, au lendemain des attentats londoniens du 8 juillet l'affliction de nos amis britanniques..

Par Alain Deschamps

L’Empire britannique s’expose à Bristol

Lorsque, en 1953, la Reine Elisabeth II monta sur le trône, la Grande Bretagne régnait sur un quart du monde. Quelques années plus tard il n’y avait plus d’Empire britannique ; Il semblait n’avoir laissé aucune trace dans les mémoires !...

Pire encore ! Quand, vers le milieu des années 60, le soleil se fut couché sur cet Empire et que jamaïcains, indiens, pakistanais, et autres anciens sujets exotiques affluèrent en Angleterre, leur évocation des abus qu’ils avaient endurés durant 350 ans de conquête et de domination, effaça dans le public, le souvenir des gloires passées de l’époque impériale et la fierté de ses accomplissements. «  On ne pouvait plus, sans embarras, parler de l’Empire britannique. » Un journaliste du Times le comparait à « un trou noir de l’histoire dont rares étaient ceux qui osaient sonder les profondeurs ». Dans les écoles on en parlait à peine…

Quand, vers le milieu des années 70, John Letts, un éditeur, souhaita qu’un musée lui soit consacré, il ne fut guère entendu. Après tout, les riches collections africaines et asiatiques du British Museum présentaient déjà à leurs visiteurs les splendeurs de ces civilisations lointaines cependant que le Commonwealth Institute offrait une image multiculturelle rassurante de ce qu’était devenu l’Empire.

L’opiniâtreté de Letts finit pourtant par lui gagner des alliés et des financements privés de l’ordre de 15 millions de dollars. En novembre 2002, un musée de l’Empire britannique et du Commonwealth fut inauguré à Bristol par la princesse Anne, fille de la Reine.

Il offre une présentation équitable et équilibrée des lumières et des ombres des temps révolus. On peut donc en parler. Et on en a parlé. L’inauguration a été suivie d’une floraison d’articles de presse sur le musée et les relations malaisées de la Grande Bretagne avec son passé colonial, certains y voyant l’origine de problèmes contemporains comme les tensions indo-pakistanaises à propos du Cachemire, le conflit israélo-palestinien et même l’Irak (qu’après la première guerre mondiale la Grande Bretagne s’était appropriées lors du dépeçage de l’Empire Ottoman.) On a comparé à la domination mondiale britannique d’hier celle des Etats-Unis d’aujourd’hui.

Les réactions au nouveau musée ont été, dans l’ensemble, modérées. Ni fierté nationale exacerbée ni excessive repentance. Tandis que la Belgique exprimait ses regrets pour son implication dans le meurtre de Patrice Lumumba, il n’a jamais été question que la Grande Bretagne s’excuse de ses « méfaits impérialistes » (contrairement à la France !)
Pour son directeur, « le musée ne dissimule pas les réalités, y compris les périodes les plus contestables de notre passé. Sa mission est de rassembler les éléments d’une histoire oubliée qui menaçait de disparaître et d’être un forum pour des débats à son sujet ». Cet objectif semble avoir été atteint.

A.Deschamps

A Paris : Hommage à SAVORGNAN DE BRAZZA   Par Raymond Césaire

L’Académie des Sciences d’Outremer a rendu le 7 octobre un émouvant hommage à Pierre Savorgnan de Brazza à l’occasion du centenaire de sa mort à Dakar en septembre 1905.
Présentée par Jean Hubert-Brierre, la séance de l’Académie a laquelle participait M. Messmer, plusieurs anciens ministres et bon nombre de membres d’AROM, a entendu trois exposés :
 
Jean Martin, Professeur émérite de l’Université de Lille, a rappelé l’origine aristocratique italienne de la famille Brazza. Né en 1852, Pierre de Brazza voulut très tôt être marin. Sa rencontre fortuite avec l’Amiral de Montaignac, qui commandait l’escadre de méditerranée, allait décider de son destin. Celui-ci le fit venir à Paris, surveilla ses études et le fit rentrer à l’Ecole Navale (où il eut pour condisciple Pierre Loti). Comme il ne pouvait prendre part à titre étranger à la guerre contre la Prusse, il fut envoyé en Kabylie où il vit comment, par opposition à la violence qui régnait, capter la confiance des populations indigènes.
Il réussit enfin, en 1872, à embarquer à titre étranger à bord d’une frégate de surveillance qui le débarqua au Gabon avec mission de remonter l’Ogooué dont l’embouchure venait à peine d’être reconnue. Après une avancée rapide jusqu’à l’Alima, Brazza prit la mesure des moyens qui lui seraient nécessaires pour poursuivre son exploration. Il fit demi tour et  proposa  à son protecteur, devenu Ministre de la Marine, de revenir avec une expédition légère. Même s’il n’avait pas atteint le Congo où Stanley le devancera, la manière, nouvelle, dont avait été menée cette exploration connut  un grand retentissement. 

Naturalisé en 1874, Brazza mena sa seconde exploration avec la seule aide d’un médecin auxiliaire de la Marine le Dr Ballay, du Quartier Maître Hamon, d’un naturaliste, Alfred Marche et d’une douzaine de laptots commandés par le Sergent Malamine. Cette expédition permit de fonder Francheville (devenue aujourd’hui Franceville) et de signer, le 3 octobre 1880, le fameux traité avec le Makoko (chef) des Batékés qui, chose rare à l’époque pour un tel document, fut ratifié par le Parlement. Géant au regard d’une infinie douceur, dont l’approche humaniste et la recherche de paix et de dialogue avec les populations semblaient montrer une nouvelle voie à  la colonisation, Brazza connut à cette époque, à Paris et en Europe, dans les salons comme dans les sociétés savantes, une popularité considérable.

Il organisa en 1883-85 avec des moyens sensiblement plus importants et des compagnons qui restèrent sur place sa grande « mission de l’ouest africain » qui permit de fonder Brazzaville en 1885. Sa nomination de Commissaire général du Congo français, scella l’organisation de la colonie qu’il continua sur place à explorer et à défendre à Paris et en Europe. C’est à l’occasion d’un de ses retours à Paris qu’il se maria en 1895 avec Thérèse de Chambrun.
L’administration coloniale et la marine, jalouses du  succès de cet « étranger », bien qu’il fut naturalisé, n’eurent cependant de cesse que d’en revenir à une organisation du territoire plus classique. Attaqué à Paris pour son approche trop idéaliste des problèmes et se heurtant sur place, faute de moyens, à des difficultés grandissantes, Brazza, peut-être davantage explorateur qu’administrateur, et dont la santé s’était détériorée, fut rappelé en 1897 en congé de convalescence. Amer, il se retira à Alger avec sa famille.

Le climat de violence et d’affairisme qui marquèrent l’histoire de l’Afrique centrale au début de ce vingtième siècle finit par faire scandale. Pour l’occulter, on tira Brazza de sa retraite pour lui confier une mission d’enquête en 1904-05. Sa femme l’accompagna. Alors que ceux qui l’avaient connu avaient disparu ou étaient écartés, cible des critiques de ceux qui l’avaient remplacé, il  se vit systématiquement empêché de remplir sa mission. Victime d’une bilieuse que le Dr Ballay ne parvint pas à enrayer, il succomba à Dakar sur le chemin du retour. L’émotion en France fut extrême et des funérailles nationales furent organisées  le 3 octobre 1905 avant son inhumation à Alger.

Paul Kaya
L’ancien Ministre d’Etat congolais, présenté par Michel Levallois, rappela ce qu’était le Royaume de Loango, l’influence portugaise et les rapports de voisinage entre les tribus bien avant l’arrivée de Brazza. Les échanges étaient nombreux et la traite, qui avait prospéré  tant qu’il y avait eu une demande, tendait à disparaître. Les Batékés et leurs vassaux tenaient le haut du fleuve, les Bacongos et les Loangos, répartis entre le pool et la côte et assuraient le commerce avec les  étrangers, Portugais, Anglais, Hollandais, Français.

Les montagnes, les fleuves ou l’autorité des  chefs délimitaient l’aire d’extension des tribus entre lesquelles les liens de vassalité étaient assez lâches. Des produits de cueillette ou de chasse et des marchandises comme l’ivoire ou les peaux donnaient lieu à du troc ou à des échanges contre des étoffes des perles et des fusils de traite avec les tribus côtières. Les religions catholique et protestante, dont les symboles avaient souvent été intégrés par les royaumes et chefferies locales, étaient déjà connues, de même évidemment que l’Islam.
La conquête pacifique de Brazza fut ainsi facilitée par un état d’esprit plutôt timoré et rarement belliqueux des populations des régions de l’Ogooué puis des Batékés qui étaient surtout des marchands. Les difficultés commencèrent au nord du pool puis en forêt, lorsqu’il fallut assurer le portage et faire la liaison avec la côte. Des tribus comme les Apfourous ou les Bayakas, réputées féroces voire anthropophages, furent plus difficiles à rallier.
 
Catherine Coquery-Vidrovitch,
Historienne, professeur émérite de l’Université de Paris VII et auteur de 2 volumes sur Brazza et la prise de possession du Congo français, Catherine Coquery-Vidrovitch  retraça l’épopée des compagnons de Brazza, depuis la poignée de jeunes gens épris d’aventure qui l’accompagnèrent dans sa première mission, jusqu’au choix  personnel et pointilleux de ceux aux talents extrêmement variés qui allaient fonder les stations et les administrer avec des méthodes sensiblement différentes de celles qui prévalaient à l’époque.
Avec le Dr Ballay, Alfred Marche et Hamon, de Chavannes fut l’un des premiers compagnons les plus précieux. Les Laptots  (tirailleurs sénégalais), dont seule la France pouvait disposer grâce à son début d’Empire, jouèrent aussi un rôle considérable dès la première expédition pour assurer ou encadrer le portage. Lors de la seconde expédition, le sergent Malamine, un Ouolof, qui avait déjà connu la zone avec la mission « Monteil », devint l’interprète et l’homme de confiance de Brazza au point qu’il garda le poste et repoussa les tentatives de Stanley lorsque celui-ci, profitant de l’absence de Brazza, voulut s’installer sur la rive droite du pool.

La notoriété de Brazza, les espoirs que suscitait l’aventure coloniale et la diversité des spécialisations auxquelles il fallait faire appel l’amenèrent à recruter,  lors de son troisième voyage plusieurs centaines de  compagnons de grande valeur : Albert Dolisie, brillant polytechnicien, des ingénieurs des mines tels de Lastours et Laneyrie, des naturalistes tel Thollon, tous morts sur place de maladie ou d’accident. Leur caractéristique commune était peut-être d’avoir foi dans leur chef et de très grandes capacités d’adaptation. Le Dr Ballay et de Chavannes seront, peut-être davantage que Brazza lui-même, les chroniqueurs de la Mission. Le grand reporter photographe en sera Jacques de Brazza, venu rejoindre son frère et qui, avec son camarade italien, Attilio Pecili, laissera une remarquable documentation sur la région et cette période, démontrant ainsi le sens très aigu de la communication qu’avait l’explorateur.
Brazzaville ne fut, pendant les premières années, qu’un poste  de transit vers le nord. L’Acte Général de la Conférence  de Berlin, à laquelle participa Ballay, date de 1885. La mission Marchand ne passa qu’en 1896 mais c’est dès 1898 que fut inauguré  le chemin de fer  Matadi. Léopoldville qui allait procurer aux Belges un avantage décisif dans cette région.

Echange de vues

Les arrières petits fils et neveu présents soulignèrent l’idéalisme désintéressé de Brazza qui n’hésita pas à engager toute sa fortune et celle de sa famille pour venir en aide à « ses chers Congolais ». Les familles ont donné leur accord au transfert des cendres au Congo dans un monument situé prés de l’ancienne mairie dont la première pierre a été posée en janvier par les Présidents Chirac, Bongo et Sassou et qui devrait être inauguré l’année prochaine.

 Jacques Mullender, qui fut Administrateur au Congo, rappela la cérémonie grandiose qui avait marqué, en 1952, le centenaire de la naissance de Brazza. Il remit aux membres de la famille un exemplaire du timbre qui avait été émis à cette occasion.

Raymond Césaire, ancien Ambassadeur à Brazzaville, souligna que l’universalité des valeurs défendues par Brazza se trouve aujourd’hui reconnue par le fait que Brazzaville soit la seule capitale d’Afrique qui porte encore le nom de son fondateur.

Hervé Zébrowski, fils d’administrateur, né au Congo, a présenté et plaidé pour Romaric Ngouayoulou, fils du dernier Makoko, qui se débat à Paris pour obtenir un titre de séjour …  triste et dramatique retournement de l’histoire.

 

Vu, Lu, Entendu

Entendu à la radio 

Tempête sur un confetti

Dans son éditorial d’EUROPE 1 du 25 septembre Catherine Nay a traité, avec son esprit de synthèse et son bon sens habituel, de la « tempête » suscitée par François BAROUIN, le ministre d’Outre-mer, lorsqu’il a évoqué la difficile application du principe du « droit du sol » français dans les pays d’Outre-mer (Les « confettis » de l’ancien Empire) dont il a la charge.
Le problème : l’afflux des émigrées étrangères - le plus souvent clandestines – qui viennent accoucher dans un territoire français d’Outre-mer pour que le « fruit de leurs entrailles » puisse bénéficier de la nationalité française.

Visés en  particulier : la Guadeloupe (par les Haïtiens), la Guyane (par les voisins du Surinam et du Brésil) et surtout Mayotte (par les citoyennes de la République fédérale Islamique des Comores). Cette « collectivité territoriale » (ni Dom, ni Tom) de 375 km2, a, en effet, le privilège d’abriter la maternité française la plus « productive » (si l’on peut dire), à MAMOUTSOU : 8000 naissance par an !
Ballon d’essai du ministre : faut-il revoir, dans ces pays lointains,  le code de la nationalité française qui privilégie, si fortement, le « droit du sol » sur «  le droit du sang » ?
Beau sujet théorique – voir existentialiste – de nature à enflammer intellectuels et politiques.
Remarques de l’éditorialiste :
Sur le plan juridique – réf. Conseil constitutionnel – il n’est pas impossible d’appliquer des dispositions particulières face à des situations particulières.
Sur le plan politique, n’est ce pas pousser le bouchon trop loin que de suspecter le ministre d’une manœuvre pour débaucher les électeurs du Front National ?

Affaire à suivre, sûrement longuement, si les radios y prêtent vie (Voir déjà le Monde du 20 septembre puis du 10 octobre)…..

                    Jean Serjac

Vu à la Télé 

Escale au Bénin

Au royaume de GLE-GLE et de BEHANZIN, à la colonie du DAHOMEY, ont succédé la République du BENIN, qui, sur 120 Kms développe ses rivages sur le golfe du même nom,…..
FR3, dans le magazine de la mer de G. Pernoud : THALASSA, nous à donné, le 12 Août, quelques images colorées de ce pays où la modernité coïncide, sans heurts « existentiels » avec l’irrationnel – COTONOU, PORTO-NOVO (la capitale officielle), OUIDAH : images d’hier et d’aujourd’hui.

La lagune entre Cotonou et Porto-Novo nous présente des villages de pécheurs et commerçants sur pilotis, villages dans lesquels on ne circule qu’en pirogue. Très loin, très prés, les grues métalliques du grand port voisin. Très prés en tout cas, la frontière du Nigeria dont les villages, communiquant par des canaux avec leurs frères de l’Ouest, ont un attrait exceptionnel : l’essence y est deux fois moins chères d’où un trafic incessant – clandestin, au vu de tous, - de jerricanes que les Béninois vont remplir dans leurs pirogues… Pendant que les stations d’essence officielles sont pratiquement désertes.

COTONOU fait maintenant concurrence à LAGOS, (handicapé par trop de pagaille et de corruption, explique Thalassa.) Images vraiment étonnantes de ces longues files de voitures déchargées d’énormes conteneurs européens, qui vont prendre les pistes de brousse pour gagner leurs clients du Nigeria. Chaque voiture importée ferait vivre ainsi 7 Béninois, astucieux, débrouillards, dynamiques : chauffeurs, réparateurs, intermédiaires de tout poil : les parkings, vus d’avion, de ces voitures en transit sont immenses. Les plus importants d’Afrique, dit le commentateur.

A l’Ouest, sur les plages, nouvel exemples d’activités « informelles » (comme disent les économistes), informelles car comptabilisées par aucune statistique ! Les camions, innombrables, viennent charger clandestinement, jour et nuit des tonnes de sable qui seront transformées en m2 de béton, dans tout le pays. Dans le même temps, sous le choc des vagues de l’Atlantique, la côte recule de quelques mètres chaque année !....

Mais ces méthodes d’efficacité d’aujourd’hui, apparemment font bon ménage – sans complexe – avec les souvenirs du passé. A OUIDAH, rappelle Thalassa, grand port d’embarquement du « bois d’ébène » au 17/18è s., le « matériel » était fourni par le pouvoir royal de BEHANZIN et ses ancêtres (monopole d’état comme celui jadis, du sel chez les rois de France ou de l’opium indochinoise sous le gouvernement de la 3ème république…).
Aujourd’hui à OUIDAH – Une arche moderne, labellisée « UNESCO » célèbre ceux qui sont « partis pour ne plus revenir »…Mais - souligne le reporter - les descendants des quelques esclaves affranchis du 18è s. qui ont retraversé – libres – l’Atlantique – ont continué …. ce commerce fructueux des esclaves ! S’il y avait des acheteurs, c’est parce qu’il y avait des vendeurs, rétorques un sage interviewé, pendant qu’autre/sage aussi réplique : s’il y avait des vendeurs, c’est parce qu’il y avait des acheteurs ! G. Pernoud parle ici comme un historien patenté ! Sans langue de bois !

Les pêcheurs, de leur côté, continuent, comme par le passé, à traverser la barre dangereuse pour jeter, en mer, leurs filets…Mais non sans avoir invoqué la protection de ces forces obscures mais puissantes puisque mystérieuses que révèle le culte du Vaudou. Ce culte est de plus en plus présent dans la jeune république. Le grand prêtre vaudou de Cotonou ne se fait-il pas photographier à côté des autorités officielles !
La République du Bénin sait, sagement, composer avec les us et coutume des électeurs…….

    Jean Serjac

Vu au Cinéma 

Le « Temple du Cinéma » voulu par Henri Langlois existe désormais.
C’est la nouvelle cinémathèque inaugurée tout récemment au 51, rue de Bercy.
C’est un vaste complexe de 14 400 m2 qui permettra – nous le souhaitons – de revoir les bons films des pays d’Outremer à ne pas oublier : par exemple, le Mali avec « Ouelem » le Cambodge avec « La déchirure », sans oublier la Cochinchine avec « Le parfum de la papaye verte, dont on appréciera tout particulièrement « l’AROM » !

Du Cameroun au Cambodge

Les nouvelles des cinémas du Sud sont rares en ce moment. A signaler cependant deux films nouveaux en provenance l’un du Cameroun, l’autre du Cambodge.

Le malentendu colonial
Cameroun, France, Allemagne. Durée 1h18.

Le Malentendu Colonial est un film de Jean-Marie Teno, cin éaste camerounais, qui a déjà à son actif une bonne douzaine de documentaires et de fictions dont « Afrique je te plumerai » au titre évocateur, Vacances au pays dans lequel il refait le voyage qu’il entreprenait, enfant, du lycée de Yaoundé à son village natal, le mariage d’Alex, excellent document sociologique où il raconte la cérémonie de mariage d’un ami avec sa seconde femme, etc.
Dans son dernier film Teno montre comment les missionnaires partis « proclamer l’Evangile à toute la création » ont accompagné et soutenu le colonialisme en Afrique, et comment cette dialectique entre éthique chrétienne et intérêt marchand a eu pour conséquence le traumatisme des colonisés et le préjugé des colonisateurs.
« C’est avec intelligence et rigueur journalistique, écrit-on dans « Les Inrockuptibles » que Jean-Marie Teno avance dans la découverte et la compréhension de ce pan méconnu d’histoire européenne et africaine ».

Les artistes du théâtre brûlé
France-Cambodge 2005 – 1h25.

Les artistes du théâtre brûlé est le dernier film de Rithy Panh à qui l’on doit entre autres « S 21 la machine de guerre Khmer rouge » dont nous avons rendu compte en son temps.
Dans ce documentaire teinté de fiction le réalisateur poursuit le travail de toute sa vie : scruter une société cambodgienne traumatisée par le génocide.
Le film met en scène un groupe d’acteurs qui continuent à hanter le théâtre de Phnom Penh en ruines depuis dix ans alors qu’à deux pas se construit un énorme casino. Ils n’ont plus de moyens de travailler ni d’ailleurs de public, vivent de petits boulots, clips pour la télévision, karaoké, et épaississent leur maigre soupe avec les chauves-souris attrapées dans les combles.
Le souvenir des années terribles revient sans cesse. Mais ce que nous montre Rithy Panh du Cambodge d’aujourd’hui n’est pas joyeux non plus : une ville déglinguée, les égouts bouchés quand il pleut, des nuées de pauvres glanant dans les décharges publiques…Le film n’est pourtant pas désespéré : et secrète, à travers l’amertume, l’angoisse aussi des personnages, une profonde émotion. Ce film c’est en quelque sorte de « l’art-thérapie » à l’intention des Cambodgiens, suggère à juste raison Télérama.
Le film sort en France le 9 novembre.

           G. Sanner

Lu dans la Presse

La générosité des pays riches

Le Monde du 20 septembre fournit des informations intéressantes sur les dons des pays développés (aide publique au développement : APD) en faveur de ceux qui ne sont encore qu’au stade de devenir développés (P.V.D. !)

Ainsi, selon un graphique établi par un « réservoir à idées » américain  (Think Tank) le Center for global développment (CGD) le palmarès n’est guère élogieux pour la France. Il est vrai qu’une étude du même genre de l’OCDE place la France au 7ème rang (ce qui est mieux) des 22 pays donateurs étudiés….

Mais on ne sait pas si les aides apportées par la France dans ses DOM TOM sont comprises dans ces statistiques internationales (il s’agit en effet, juridiquement de virements internes entre parties de la république)….
La récente annulation de la dette des pays les plus pauvres par la Banque Mondiale ne parait pas être prise en compte non plus par les auteurs des statistiques indiquées par le Monde.

Bonne occasion de se rappeler la célèbre maxime d’Auguste DETOEUF :  « On ne demande comment une statistique est faite que lorsqu’elle prouve autre chose que ce que l’on désire ».

                   Jean Serjac

La colonisation en procès

La revue « HISTOIRE » a publié en Octobre un numéro spécial consacré à la « Colonisation en procès ». En procès, car, comme le note très bien Michel Winock, « aujourd’hui c’est l’histoire coloniale qui est incriminée par les accusateurs publics….Il faut en convenir dans cette bataille de mémoire, l’anticolonialisme est plus dans l’air du temps que la défense de la colonisation ».

De fait, la revue, en une douzaine d’articles d’auteurs différents, donne place à la « défense » : L’école de la France d’Outre-Mer, le bilan économique (Jacques Marseille), celui de la santé (Anne Hugon), portraits élogieux de Lyautey, Félix Eboué…Mais aussi à « l’accusation ». Articles aux thèmes extrêmes : « la loi scélérate » (celle du 23/02/05) « des zoos humains aux expositions coloniales, « le travail forcé c’est l’esclavage »….etc.


Mais le plus féroce de tous c’est encore cette caricature « politique » qui date de 1904..dessin présenté par la revue à titre de document historique….C’est en effet, sans doute le rôle d’une revue qui s’appelle « l’histoire ».

         Jean Serjac

 

PAGES D’HISTOIRE OCCULTEES

Le monde Diplomatique d’Août/Septembre 2005 présente 24 articles représentant 24 manières de voir des évènements du passé « occultés » jusqu’à maintenant…
L’illustration de la page de garde (un esclave noir enchaîné) n’est pas anodine, ni la 4ème de couverture qui reproduit 6 couvertures de  livres de « La Découverte » aux titres explicites : « Massacres coloniaux », « Génocides tropicaux », « Ratonnades à Paris », etc…

On retiendra ici, seulement 3 articles traitant de sujets intéressant AROM.

Tocqueville, apôtre de la colonisation par Lecour GrandmaisonLe célèbre auteur de « la démocratie en Amérique », n’est pas le démocrate que l’on croit, mais un  « apôtre de la domination totale en Algérie », admirateur des méthodes musclées du Général BUGEAUD qu’il avait pu constater sur place.

Quand les états Africains contribuaient à la traite par Elikia M’Bokolo – Ce directeur d’études à l’Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales de Paris (E.H.E.S.S.) explique comment « 14 siècles durant la traite organisée par les pays musulmans, puis par les états européens a trouvé des complices dans la société africaine. »
Explications assez objectives, si, au fil des phrases, on ne trouvait des réflexions nées de la sensibilité personnelle de l’auteur, plutôt que d’une froide analyse : Plus d’indulgence en tout cas pour la traite orientale que pour celle des européens…Pour leur part, les états africains  - écrit-il notamment - se sont laissés pièges par les négriers européens….Un peu facile, mais mérite d’être lu.

Les génocides dans les manuels scolaires par Maurice T.Maschino. Ce journaliste décrit avec une minutie d’entomologiste ce que les petits français, de la 6ème à la terminale peuvent apprendre des génocides (mot employé, comme souvent, sans aucune précaution) – Hélas ! Très peu de choses,  excepté la SHOAH car leurs manuels officiels sont bien trop discrets. Ainsi les élèves ne savent même pas « qu’entre 1900 et 1911 le turbulent peuples Baoulé (Côte d’Ivoire) a été ramené de 1.500.000 à 160.000 personnes » ! Tandis que « le massacre des 500.000 TUTSI est passé à la trappe », la traite des noirs ayant, par ailleurs, prélevé seulement 1 million d’esclaves……L’enseignement officiel, qui ne forme pas ses enseignants, est le grand responsable de ces oublis. On ne peut que compatir à la plainte d’une jeune agrégée « J’ai du me former moi-même….Combien de collègues épuisés par un métier de plus en plus dur sont en état de faire cet effort ?  Un nouveau génocide en perspective ?......

   Jean SERJAC

Vigilance aux TUAMOTOU


« Valeurs Actuelles » du 5 Août 2005  nous apprend qu’un accord a été passé entre le gouvernement de la Polynésie française et celui de la république française : c’est le Ministère de la Défense de cette dernière et non le gouvernement de Papeete qui aura la charge d’assurer la sécurité – politique et sanitaire des 2 atolls de Mururoa et Fangataufa  où se sont déroulés jusqu’au 27 janvier 1996 les essais atomiques français…. Les récifs sont auscultés désormais 24h sur 24 pour déceler toute trace de présence radioactive. Le centre d’expérimentation du Pacifique (le CEP) responsable des opérations de surveillance déclare que « Muru et Fanga » sont les îles les plus surveillées du monde !
Actualité oblige : Thalassa a consacré le 9 septembre une longue émission sur les risques nucléaires qui planeraient encore sur ces atolls….Une émission assez « orientée » qui tranche avec l’objectivité habituelle de cette émission.

        Jean Serjac

Lu chez le libraire

Les Comores d’Ahmed Abdallah - Mercenaires, révolutionnaires et coelacanthe Par Alain Deschamps Editions Kartala (189 p.)

Les Comores (Grande Comore, Anjouan, Mohéli et Mayotte) sont « les îles de la Lune » mais aussi « l’archipel aux sultans batailleurs » Le Karthala, volcan endormi de la Grande Comore, s’honore d’avoir donné son nom à un éditeur apprécié.
Lointaines, un peu perdues au large de la côte africaine, c’est un monde à part qui, heureusement préservé du tourisme de masse, a conservé toute son originalité.
Le livre d’Alain Deschamps, qui y fut, près de 5 ans (1983/1987), notre ambassadeur accrédité auprès du Président Ahmed Abdallah, en apprendra beaucoup aux curieux, voire aux nostalgiques, de ces pittoresques « îles aux parfums » au peuple aimable et à l’histoire mouvementée (18 coups d’Etat ou tentatives de coups d’Etat en moins d’un quart de siècle) Pierre Vérin, incontournable expert de l’Océan Indien et bon connaisseur des Comores en a écrit la préface.
Ahmed Abdallah ‘père de l’indépendance » comorienne de 1975 fut avant celle-ci un sénateur français dont le vote courageux en faveur d’un autre sénateur menacé d’exclusion lui assura la reconnaissance du Président Mitterrand supportant avec équanimité les humeurs d’un ancien collègue pourtant bien incommode avec ses sempiternelles revendications sur Mayotte la quatrième patte du bœuf comorien » restée française. Deschamps, qui calcule avoir passé plus de cent heures en audiences avec ce chef d’Etat ombrageux, honni par les bien pensants de notre « rive gauche » pour s’être proclamé « non aligné, c'est-à-dire non aligné sur Moscou » en trace un portrait plutôt sympathique.

Les mercenaires ce sont Bob Denard et la quarantaine de ses « soldats de fortune ». Ali Soilihi avait eu le grand tord de les appeler pour renverser Ahmed Abdallah et probablement celui, qui lui fut fatal, de ne pas les payer. Ils régnèrent de longues années sur la Grande Comore, jusqu’au sombre jour de 1989 où une discussion un peu trop vive avec Abdallah s’acheva parle meurtre de ce dernier. En France le pouvoir, avec lequel « Bob » devait avoir quelques discrètes accointances, et que Deschamps avait, en vain, prévenu du danger s’émut enfin. Il envoya quelques troupes qui expulsèrent les « affreux »…pour un temps.
Les révolutionnaires ce fut le malheureux Ali Soilihi dont l’éphémère « République des imberbes » semble préfigurer nos manifestations de lycéens syndiqués. Ce sont aussi les « polpotistes dont le complot d’assassiner tous les mercenaires fut, juste à temps, éventé.
Le coelancanthe c’est ce poisson vieux de 350 millions d’années, dans lequel les experts voient « le chaînon manquant entre la vulgaire sardine et le mammifère supérieur que nous prétendons être » et dont les eaux comoriennes revendiquent le monopole. Deschamps eut avec lui une brève rencontre.

Celles qu’il eut avec ses rares collègues sur la place : le chargé d’affaires de Mao Tse Toung sculpteur de noix de cocos et l’angélique consul officieux du « pays de l’apartheid », n’animaient guère la vie diplomatique. Et tout contact avec les mercenaires lui était interdit. Mais la « nomenklatura » locale, toujours bruissante de complots, fournissait des convives amusant et policés. Nos compatriotes se plaisaient dans ce pays au climat pourtant malsain et entretenaient avec les insulaires d’excellents rapports. Dans ce Lilliput stratégiquement bien placé la France restait la grande puissance, fort courtisée.
Durant son long séjour, riche en péripéties, cocasses ou tragiques Deschamps ne s’est sans doute pas ennuyé. Je gage que son récit, écrit d’une plume alerte, n’ennuiera pas, son lecteur.
Des photos ou images l’illustrent. Et de bonnes cartes permettent de mieux situer le décor où s’agitent perpétuellement les acteurs de la tragi-comédie comorienne.

           Jean Rencurel.

NB : Les membres d’Arom peuvent commander ce livre à l’éditeur, 22 bd Arago, Paris 13ème au prix privilégie de 12 euros au lieu de 18 euros (port compris).
 

Les traites négrières par Olivier Pétré-Grenouilleau Ed. Gallimard, 2004, 463 pages.

Le sous-titre de l’auteur, membre de l’institut universitaire de France, indique bien - son propos : « essai d’histoire globale » – Ce livre vient à son heure après des milliers d’autres consacrés à l’esclavage car il fait raison des clichés véhiculés par une approche moralisante. Celle-ci, en effet, dépeint trop souvent, la traite des noirs tantôt comme une opération glorifiant les occidentaux cultivés face à des sauvages stupides, tantôt comme un épouvantable génocide de victimes sans défense.

L’auteur se livre donc, en préliminaire, à une  comparaison historique dans ce monde, depuis la plus haute antiquité jusqu’à ce jour. La traite des noirs n’est pas -  remarque-t-il - la seule grande migration forcée d’êtres humains de l’histoire. Pensons à la déportation des hébreux (Babylone en -587) ou à celle des arméniens de Turquie en 1917. L’esclavage a été une « composante des sociétés les plus évoluées au cours des siècles » : Egyptes, Grèce, Mexique, Chine etc.
Ce n’est qu’à partir du « siècles des lumières » en Europe qu’on a commencé à s’interroger sur le bien fondé de cette pratique.

En pays d’islam, l’esclavage était « une institution commune et solidement enracinée » indique l’auteur. Quand il n’a plus été possible de se procurer des esclaves (de naissance ou en captivité) sur place il a bien fallu en chercher ailleurs : chez les noirs, lesquels – écrit un poète persan du 13e s. cité « sont seulement différents des animaux en ce que leurs 2 mains sont levées au dessus du sol ». Les  premiers esclaves noirs furent d’abord transportés a partir des pistes transsahariennes…Mais une fois la « Reconquista de l’Espagne achevée, et les Canaries redécouvertes, les portugais commencèrent à partir du 15e s. à mettre en place le fameux commerce triangulaire transatlantique qui ne s’acheva vraiment qu’à la fin du 19e s.
A ce propos, Pétré-Grenouilleau fait remarquer que le plus grand pont de ce trafic ne fut pas Liverpool ou Nantes mais….Rio de Janeiro, car les Brésiliens au 19e s. prirent le relais des  négriers anglais, hollandais, français, les grands organisateurs du 17e et 18e siècles.

L’auteur chiffre à quelque 11 millions le nombre d’Africains déportés vers les Amériques en 1450 et 1867. Quelques autres, 17 millions auraient été déportés vers l’Orient entre 650 et 1920 auxquels il faudrait ajouter -écrit-il- quelques 14 millions de malheureux objets d’un trafic interafricain.

La marge d’erreurs serait, dit notre chercheur de l’ordre de 25%. Pour sa part, un autre historien, Gilles Mancergon dans la revue de la Ligue des Droits de l’Homme, limite à 4 millions le nombre de victimes de la traite transharienne d’initiative arabe et africaine….Mais il ne précise pas « sa marge d’erreur » (cf. Le Monde du 7/3/2005).

Au delà des chiffres, dont seul l’ordre de grandeur est vraiment utile à connaître, le livre de Pétré-Grenouilleau est à lire, car, débarrassé des clichés et des tabous usuels, il restitue la complexité d’une histoire d’un des phénomènes mondiaux des plus importants.

       Jean Serjac

Les traites négriéres

A COMPLETER

La vie d’Arom

Activité de l’association

Notre site AROM : www.arom-asso.com est opérationnel

Vous y trouverez, bien sur, les objectifs de notre association et les actions prévues pour les atteindre. Mais il  contient également les articles que vous avez écrit et qui ont paru dans les bulletins périodiques de l’association (nous en sommes déjà au numéro 7  !) *.

Que s’est il dit à la dernière assemblée générale à laquelle vous n’avez pu assister ? Quels sont les sites d’intérêt, en rapport avec l’article, que vous avez consulté sur tel ou tel bulletin dans le site  ? Quels sont nos partenaires ? Ont-ils un site ? Comment y accéder ? Que contient le fonds documentaires ?

Aujourd'hui vous trouverez (…j’espère) sur ce site les réponses à ces questions. Demain nous prévoyons d’améliorer et d’enrichir ses possibilités ; par exemple :

Recherche de la liste des articles contenant tel(s) mot(s) clé(s)
Ouverture d’un forum d’échanges entre les membres
Informations sur les manifestations en rapport avec nos activités …….

Puis je me permettre une remarque ? Elle est importante…..je peux ?Ce site n’aura de réel intérêt pour vous que si vous y trouvez ce que vous attendez ! Aussi faites vos remarques, faites vos critiques et vos suggestions. Je suis à votre écoute sur mon mail (courriel ?) : fatthalin@wanadoo.fr. Je m’engage à y répondre.

Je vous propose de nous retrouver dans un très prochain bulletin pour faire un premier point de l’usage du site et vous apporter quelques conseils sur son utilisation.

Bonne visite sur le site www.arom-asso.com

François Laurent-Atthalin

  • L’intégralité d’un bulletin est mis à disposition sur le site quelques jours après réception du bulletin suivant.
Lettres à AROM

De Martine CUTTIER                      (archives d’O.M.)
A propos de l’article sur les lieux de conservation des archives d’O.M. (B6 p16), Louis Amigues a oublié le CHETOM. Même si ce sont des archives militaires, elles sont coloniales et permettent de travailler sur la dimension militaire du fait colonial. La rédaction  Omission réparée à cette occasion, Martine Cuttier est une spécialiste de l’histoire militaire coloniale.

Du Général Albert DUPONT             Madagascar

Le général Dupont, qui a servi de 1970 à 1973 à Madagascar dans le cadre de l’Assistance technique, conteste certaines appréciations portées par A. Deschamps dans sa relation du livre « Au pays de Ravenala » de M. Delaunay sur le comportement de la gendarmerie malgache.
Sa lettre de 3 pages, très intéressante pour les spécialistes de l’histoire de Madagascar a été communiquée, (avec son accord) à l’auteur de l’article, lequel confirme son point de vue. D’une manière générale, la rédaction du bulletin est toujours heureuse de prendre connaissance des réactions des lecteurs sans « tabou » ni a priori.

De René LENOIR                                Algérie

Dans le résumé du livre « Coloniser, exterminer » l’auteur écrit qu’en « qu’en Algérieles terres données aux colons furent arrachées aux Arabes » ! C’est vrai pour les Hauts Plateaux ou les grandes sociétés récoltaient l’Alpha, c’est faux la plupart du temps ailleurs : 2 exemples : la Mitidja qui n’était qu’un marécage insalubre et le  témoignage du journal d’A.N. Absalon quittant sa Lorraine pour l’Algérie en 1848, reproduit dans « mon Algérie tendre et violente (Plon, 1994) ».
la rédaction L’auteur de l’article (B6 p26) ne faisait que reproduire la teneur du livre de Le Cour Grandmaison. Arom peut adresser à ses membres l’extrait du livre « Mon Algérie tendre et violente » qui lui a été transmis, en leur recommandant vivement la lecture complète de l’ouvrage.

Du Colonel MADEMBA BY                   Burkina Faso
« Je suis très ému de lire, enfin, quelques lignes sur cet homme de bien qu’était LAMIZANA. Voici une nouvelle manifestation du devoir de mémoire façon France 2005. En ce temps de repentance, « politiquement correct » on se s’étonne plus de rien !
La rédaction  Arom a accompli, en la circonstance son devoir de mémoire conformément à sa vocation.

De André ORTOLLAND                         Madagascar

Le livre de M. Delaunay contient certaines erreurs. En particulier, la statue du Général Gallieni n’a pas été déboulonnée par les Malgaches, mais c’est l’ambassadeur de France qui l’a fait enlever, tôt le matin du 4 Avril 1964, la statue du général édifiée 40 ans auparavant. Pour mémoire, à Diego Suarez, la statue de Joffre, le créateur de la ville est toujours sur son socle.
La rédactionCes mises au point sont transmises à Martine Cuttier….

De Alain PIERRET                                  Algérie -Indochine

« La formule (B6 p17) : Les indépendances ont été acquises par  «  rupture » ou par « glissement » m’a plu ; je crois toutefois qu’il existe une différence fondamentale entre la manière dont l’Indochine et l’Algérie sont devenues indépendantes ». Pour la première, l’indépendance fut « conquise »,  pour la seconde, elle fut octroyée ».
La rédaction Jean Serjac n’est pas du même avis, car il estime que la véritable guerre menée par le FLN en Algérie a amené ce dernier à conquérir  une indépendance qui ne fut pas du tout octroyée unilatéralement comme celle de colonies d’Afrique Noire.

 

Les amis

Manifestations des amis d’AROM

 - ARRI   : à l’IPSEC – 16/18 Place du Général Catroux – 75017 Paris.
« Les progrès de la science de l’éducation et de l’aide aux développement mettront –ils un terme au scandale de la faim dans le monde » par Marcel Mazoyer le 7 décembre. A 18h.

 - CADE – E.N.A., 13, rue de l’Université – 75007 Paris. A 18h
« la décentralisation » le 9 novembre.
« Mythes et actualité de l’Afrique » (Xe anniversaire de la CADE) 7 décembre.

 - Académie des sciences d’Outre Mer , 15, rue Laperouse  - 75016 Paris. à 15h.

  1. Coopération au développement et politique étrangère. Par Antoine Pouillieute le 21 octobre.
  2. Ste Hélène et Napoléon par André Baccard le 8 Novembre.
  3. Les archives de A.O.F. : une mémoire partagée entre la France et les pays francophones d’Afrique de l’Ouest. Par Saliou M’Baye – 2 décembre.
  4. Les famines en Afrique par Sylvie Brunel – 16 décembre.

Association des amis d’Orient Au Musée Guimet, 6 place d’Iéna – 75116 Paris. Accés au site : www.afao-asso.fr présente son exposition : Trésors d’Art du Vietnam – la sculpture du CHAMPA - Réunion des Musées nationaux – du 12 octobre 2005 au 5 janvier 2006.

Les gens d’AROM

Carnet

  1. François Monnier est décédé le 3 septembre 2005.
  2. Alain Pierret a été élevé au grade de Commandeur dans l’ordre du Mérite Agricole par arrêté du 15 Juillet.
  3. Pierre Troude a été décoré par le Général Chavannes du Mérite Colonial à Granville le 4 septembre 2005.

Publications

Henri Leroux « Lieux ici, Afrique ailleurs », aux Editions Nouvelle Pléiade.
Dominique de Miscault : « un livre des moines bouddhistes dans le Viêt-Nam d’autrefois » aux Editions Aquilon.
François Monnier (ouvrage posthume)  « Les hommes et la terre, une prodigieuse aventure » aux  Editions l’Harmattan.

Recherche

Martine Cuttier, professeur d’histoire, particulièrement intéressée par l’histoire coloniale, aimerait réaliser un ouvrage sur la « Marianne coloniale » à la façon de Maurice Agulhon. Pour cela, elle est à la recherche de statues, monuments, plaques….disposés dans l’espace public, ayant un lien avec la conquête, la colonisation, ses acteurs civils et militaires et la participation des troupes coloniales aux combats menés en France et hors de France.

Ses coordonnées sont :
Martine Cuttier, les Trois Moulins, 31540 Saint-Félix Lauragais. Tél. /fax : 05 61 83 40 41.
Courriel : pcuttier@club-internet.fr

 

AROM et les anciens élèves des lycées d’Outre-Mer

Les anciens élèves des principaux lycées de l’ancien « empire » sont regroupés en associations, souvent encore d’une activité étonnante, qui permettent le dialogue entre les anciens et leurs enfants, qu’ils soient Français, Indochinois, Sénégalais ou Malgaches.

Plusieurs membres d’AROM ont été eux-mêmes élèves de ces établissements.
Nous commençons par un article sur les anciens du lycée d’Hanoï (Albert Sarraut) suivi du lycée Van Vollenhoven de Dakar….et bien d’autres si d’autres membres d’AROM veulent biens  nous le rapporter.